Le 10 novembre 2020,
« Ce qui était visible dans notre Sauveur est passé dans les sacrements » (Saint Léon)
Depuis le 3 novembre 2020, la célébration de messes en présence d’une assemblée dans une église paroissiale n’est plus possible à l’exception de funérailles (article 47 du décret d’application de la loi covid du 29 octobre 2020).
Cet empêchement provoque des réactions diverses. Dans le contexte de la crise sanitaire, beaucoup consentent à cette situation non choisie, sans se résigner. Des chrétiens expriment aussi leur incompréhension de ne pouvoir participer à la messe. A l’inverse, d’autres s’étonnent de ces revendications qu’ils estiment catégorielles. Les échanges n’échappent pas, parfois, à des raccourcis simplistes ; les prêtres sont interpellés pour prendre part au débat.
Les quelques lignes ci-dessous veulent rappeler quelques points importants.
L’eucharistie source et sommet de la vie chrétienne
Le désir de vivre de l’eucharistie est légitime.
Au fondement de la vie chrétienne, il y a l’acquiescement à une possible amitié personnelle avec le Christ, mort et ressuscité – c’est la promesse de Jésus au moment de son Ascension : « et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20).
Pour les catholiques, les sacrements sont les lieux privilégiés de la rencontre du ressuscité. « Ce qui était visible dans notre Sauveur est passé dans les sacrements » (Saint Léon le Grand).
L’eucharistie est le plus grand des sacrements. Au cours de la messe, Jésus est là, présent, parce que les chrétiens sont rassemblés (« quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là, au milieu d’eux. » Mt 18, 20) ; Jésus est là lorsque l’Ecriture est proclamée. Il est là, présent, dans le cœur des fidèles baptisés, dans la personne du ministre qui célèbre. Il est là, présent « au plus haut degré sous les espèces eucharistiques » (concile Vatican II).
Le désir de retrouver d’autres chrétiens pour prier est légitime.
Le christianisme est la religion de l’incarnation. Dieu s’est fait chair. L’homme, en sa réalité charnelle et spirituelle a une valeur inestimable. La vocation profonde de l’homme est d’être relié à d’autres spirituellement et corporellement. Se rassembler pour prier Dieu est intrinsèque au culte chrétien.
Le contexte de la crise sanitaire
Dans le contexte de la crise sanitaire, depuis le début du deuxième confinement, les catholiques sont empêchés de se rassembler dans les églises qui restent ouvertes pour vivre ce qui est le sommet et la source de leur existence.
Le 7 novembre 2020, le conseil d’Etat a rejeté la demande des évêques de pouvoir célébrer la messe selon un protocole sanitaire encadré. Dans un communiqué, les évêques ont exprimé leur regret de cette situation mais demandent « aux fidèles et aux prêtres de respecter cette décision ». Lors de la messe du 8 novembre retransmise sur le site du diocèse de Nantes, Mgr Percerou nous a précisé que le communiqué des évêques nous engage.
Dans un contexte sanitaire difficile et inédit où les pouvoir publics cherchent à faire pour le mieux, les évêques, plutôt que d’entrer dans une opposition frontale, ont choisi de maintenir le dialogue pour faire évoluer la législation. Ce dialogue a repris ; il sera d’autant plus fécond que les chrétiens se montreront exemplaires.
Mener le bon combat : être fidèle au Christ
Les sacrements ont été confiés aux apôtres par le Christ ; ils sont transmis par l’Eglise. Les baptisés n’en sont pas propriétaires.
Nos évêques, successeurs des apôtres, ont reçu la plénitude du sacrement de l’ordre. Ils sont les garants des sacrements ; en particulier du sacrement de l’eucharistie appelé aussi « sacrement de la communion ». Faire confiance à nos évêques et à leurs coopérateurs, les prêtres, c’est aimer l’Eglise. C’est préserver son unité.
N’ayons crainte de débattre, de prendre la parole ou des initiatives pour partager nos réflexions. Sans être dupes des germes de division qui peuvent s’immiscer, comme un virus ! En particulier, ne cédons pas à l’exagération. Contrairement à d’autres périodes de l’histoire ou d’autres régions du monde, les chrétiens ne sont pas persécutés. L’empêchement actuel de célébrer la messe est uniquement lié à une cause sanitaire. Pour l’installation de Mgr Percerou, en septembre dernier, les services de l’Etat étaient à nos côtés pour nous permettre de célébrer la messe sur la place publique et protéger les fidèles contre le risque d’attentat.
Les sacrements sont un don – et non un dû. En désirant ardemment la messe et bien mystérieusement, en respectant ce qu’elle est, il nous est donné de progresser dans notre attachement au Christ par notre ténacité dans la prière.
- Louange. Tout évènement dont nous n’avons pas la maitrise éprouve notre vocation à la louange. Au printemps dernier, un des curés de notre diocèse écrivait dans l’éditorial de son bulletin paroissial : « Allons, mon âme, arrête de gémir sur toi, sur les autorités de l’État et leurs défaillances, et même sur le coronavirus ! Tout cela empêche ton cœur de respirer la joie pascale ! Tourne-toi vers le Seigneur, dans l’action de grâce et dans la louange ! Il met au large ton cœur ».
- Communion spirituelle. Les baptisés sont dans l’impossibilité de participer physiquement à la messe. Le culte n’est pas interdit. Les prêtres continuent de célébrer chaque jour la messe, « pour la gloire de Dieu et le salut du monde ». Par leur prière, ils portent les intentions de toute vie chrétienne. Dans le corps du Christ qu’est l’Eglise, nous nous unissons à leur prière.
- Intercession. Dans l’épreuve, nous prions pour nos évêques et nos gouvernants afin que les chrétiens retrouvent le droit de se rassembler dans les églises, selon les mêmes exigences sanitaires que dans les autres lieux de la vie sociale – écoles, commerces ou entreprises. Nous prions aussi pour les vocations de prêtre, afin que leur ministère d’intercession se perpétue.
- Communion de désir. En ces jours, nous partageons l’expérience de ceux qui ne peuvent communier habituellement, en raison de leur santé, de leur situation humaine ou géographique. Apprenons d’eux à vivre la communion de désir.
- Le temps sanctifié. « La liturgie des heures – laudes, milieu du jour, vêpres, complies, lectures – est destinée à devenir la prière de tout le Peuple de Dieu » (Vatican II). Par des hymnes, des psaumes, la lecture de l’Ecriture et des intercessions, les baptisés sanctifient le temps du lever du soleil à son coucher. La liturgie des heures est comme une couronne de perles fines autour du diamant central qu’est l’eucharistie. Profitons de cette épreuve pour nous approprier davantage ce joyau de la prière publique de l’Eglise.
Grâce aux moyens technologiques, fruits de l’intelligence humaine, dans l’attente de jours meilleurs, les catholiques de Loire Atlantique restent reliés par les multiples initiatives et la créativité de chacun. La Parole de Dieu est lue et partagée par les baptisés ; commentée par les prêtres et les diacres qui en ont reçu la charge et s’adressent à leurs fidèles par des bandes sonores, la vidéo ou des écrits. Dans les églises restées ouvertes, de multiples propositions sont faites par les curés et les Equipes d’Animation Paroissiale
Chaque dimanche du mois de novembre, notre évêque célèbre une messe retransmise en direct et nourrit les baptisés de sa prédication.
Restants unis dans la prière, que cette épreuve vienne purifier notre foi et rende notre cœur disponible à l’Esprit Saint, capable de tout chose au-delà des contingences humaines, comme le suggère Sainte Thérèse Bénédicte de la Croix (Edith Stein), en camp de concentration à Dachau : “Dieu ne s’est pas engagé à nous maintenir pour toujours entre les murs du cloître. Pour Dieu, la clôture est sans importance car il y a d’autres murs pour nous protéger. Il y a là quelque chose de comparable aux sacrements. Ce sont pour nous les moyens ordinaires de la grâce, et nous ne pouvons jamais les recevoir avec trop de zèle ; cependant Dieu ne leur est pas lié. Si une contrainte extérieure venait à nous couper des sacrements, il pourrait, d’une autre manière et abondamment, compenser ce manque ; et il le fera d’autant plus généreusement que nous aurons été fidèles à recevoir les sacrements”.
Les vicaires généraux,
Pères François Renaud et Sébastien de Groulard